DES TEXTES PUISSANTS


Avec les « Pipelettres du Relais social », de nombreux textes sont nés des ateliers animés par Thierry Maricourt. Pour notre exposition « Héroïnes », nous avons choisi de vous en présenter quelques uns.

A : Comme un chewing-gum sous la semelle…
B : Elle se colle dans ta cervelle
C : Elle ne fait pas dans la dentelle
D : De temps en temps, v’là qu’elle t’appelle
E : « Dis-moi que je suis la plus belle »

A : La violence, c’est le coup de poing
B : Dans les gencives, dans les reins
C : Dans le nez, absence de témoin
D : Tu saignes et tu restes sans soin
E : La violence, c’est rien que moins

A : Les insultes, à l’arrêt du bus
B : L’autre qui te secoue les puces
C : Un tour à l’œil des montagnes russes
D : Quand une espèce de sale gugusse
E : T’examine comme à l’Argus

TOUS :
Comme un chewing-gum sous la semelle…
Elle se colle dans ta cervelle
Et jour et nuit, elle t’appelle
Sa place est dans une poubelle

A : La violence du mec bourré
B : Qui te balance ses vérités
C : Devant ta porte, pour entrer
D : Te foutre en l’air toute ta soirée
E : Et te laisser, les yeux mouillés

A : La violence de l’homme soûl
B : Qui s’en va cracher son dégoût
C : De lui-même, allez, tiens, glouglou !
D : Encore un verre et il avoue
E : Combien de tous il est jaloux

A : La violence, contre les femmes
B : Ces hommes sûrs d’eux qui les condamnent
C : À périr brûlées par les flammes
D : Et tous ces gosses qu’on affame
E : Violence loin du mélodrame

TOUS :
Comme un chewing-gum sous la semelle…
Elle se colle dans ta cervelle
Et jour et nuit, elle t’appelle
Sa place est dans une poubelle

A : Violence des jours sans argent
B : « Tes papiers ! » exige l’agent
C : Les riches devant les indigents
D : Les gestes parfois dérangeants
E : Et l’impolitesse des gens

A : La violence des racistes
B : Qui notent sur de longues listes
C : Les sorcières et les alchimistes
D : Qui veulent tuer les humoristes
E : Et ne voient le monde que triste

A : La violence, c’est si facile
B : Contre le faible, le moins agile
C : Le militaire sur le civil
D : Écoutez-le cracher sa bile
E : Le gros con qui se croit viril

TOUS :
Comme un chewing-gum sous la semelle…
Elle se colle dans ta cervelle
Et jour et nuit, elle t’appelle
Sa place est dans une poubelle

A : La violence, c’est le mépris
B : Pour tout ce qui n’a pas de prix
C : Le soleil, le vent et la pluie
D : La violence, c’est ce qu’on subit
E : Elle vient de n’importe qui

A : C’est toujours celle du voisin
B : Du mauvais copain, du conjoint
C : Qu’on la planque bien dans un coin
D : Elle ressurgit l’air de rien
E : Elle est plus fidèle qu’un chien

A : La violence, dans la rue
B : Comme le dernier mot qui tue
C : Quand tu te demandes qui es-tu ?
D : La violence de ce qui fut
E : De ce qui ne reviendra plus 

TOUS :
Comme un chewing-gum sous la semelle…
Elle se colle dans ta cervelle
Et jour et nuit, elle t’appelle
Sa place est dans une poubelle

PLUS DE BONHOMME

A : Plus de bonhomme, aujourd’hui, je suis tranquille, je fais ce que je veux de ma vie.
B : Pareil pour moi : plus de bonhomme, plus de souci, je fais enfin ce que je veux de ma vie.
C : Plus de bonhomme, moi non plus, dans mes oreilles plus de cris, je fais ce que je veux de ma vie.
D : Plus de bonhomme ? Oh, non ! Quelle tristesse ! La solitude c’est comme le sel dans les pâtes, quand il y en a trop, on n’en veut plus.

A : Plus de bonhomme, je te dis, plus de remontrances dès que je sors du lit.
B : Les courses, il ne les faisait jamais, pas le rôle d’un mari selon lui.
C : Et les enfants ! Toujours à la femme de s’occuper des petits.
D : Plus de bonhomme ? Oh, non ! Plus de torse velu contre lequel me frotter ? Ce froid sous les draps me hérisse la peau.

A : Plus de bonhomme ? Ouf, ouf et ouf ! Plus de pleurs dès le lundi.
B : Plus de bonhomme ? Ouf, ouf, ouf ! Que s’éternise ce répit !
C : Plus de bonhomme ? Ouf ! J’ai de la place, je m’installe au milieu du lit.
D : Un bonhomme, quand même, ses joues qui piquent, sa voix grave au moment du petit déjeuner…

A : Pour qu’il te rote dans le cou ?
B : Qu’il recommence à te chercher des poux…
C : Comme un vieux paon, qu’il fasse la roue ?…
D : Un bonhomme, juste pour m’aider à sortir les poubelles… Je l’appellerais mon câlinou.

A : Plus de bonhomme ? Pour moi, c’est plutôt une bonne nouvelle.
B : Plus de bonhomme ? Ce n’est jamais lui qui fait la vaisselle.
C : Plus de bonhomme ? Ce ne sera pas pour lui que je me ferai belle.
D : Un bonhomme, à l’heure d’aller coucher, même avec son haleine de mortadelle…

A : Plus de bonhomme ? Ouf ! Plus de comptes à rendre à ce radin !
B : Plus de bonhomme ? J’aurais dû écouter mes parents, qui lui trouvaient un air crétin.
C : Plus de bonhomme ? Ouf ! Me voilà débarrassée de ses mensonges et de son baratin !
D : Mais la solitude, c’est comme la neige, j’ai froid dans le dos rien que d’y penser.

A : La solitude, ça fond, ça fond, et quand il ne reste rien, pas même une petite flaque sous le soleil, tu te sens enfin heureuse, sans plus un bonhomme pour te gâcher tes journées.
B : Sans plus un bonhomme pour te mouiller les yeux, t’arracher les cheveux et te bleuir les joues.
C : Sans un bonhomme pour t’obliger à raconter partout que tu ne tiens pas sur tes jambes. Ah, ces escaliers dans lesquels tu chutes un peu trop souvent !
D : La solitude, ça peut donc avoir du bon ?

TOUS/TOUTES : La solitude, ça fond, ça fond… Sans un bonhomme pour te gâcher tes journées, tu te sens enfin heureuse

COVID MORBIDE

Ce n’est pas un crachin
Bien plutôt un crachat
Quand passe l’assassin
Nous voilà flagada
Le visage livide
On veut vivre, oh morbide !

Apparu, vieux machin,
A la fin de l’hiver
Un lourdaud bien crétin
Sourire de travers
Dans sa forêt de rides
On l’appelle morbide, covid morbide

Tourne à vide, oh, Covid, et lâche-nous les bronches !

Les vieux dans les mouroirs
Visites interdites
Chagrin dans le miroir
Plus question de visite
Cérémonial sordide
On veut vivre, oh morbide !

Abjecte pandémie
On s’en sortira bien
Que triomphe la vie
Un chat n’est pas un chien
On n’est pas tous stupides
On t’appelle morbide, covid morbide

Tourne à vide, oh, Covid et lâche-nous les bronches !

Ce n’est qu’un malandrin
Un voleur de santé
Qui se prétend copain
Pour mieux te détrousser
Il l’a rien de placide
On veut vivre, oh, morbide !

Il vient sans prévenir
Anonyme fléau
Il te file le pire
Dit que c’est un cadeau
Il joue le faux timide
On l’appelle morbide, covid morbide

Tourne à vide, oh, Covid, et lâche-nous les bronches !

Fini les embrassades
Les câlins qui rassurent
Qui veut être malade
Avoir triste figure ?
Nouvelle typhoïde
On veut vivre, oh, morbide !

On se cloître chez soi
A n’importe quelle heure
Nous voici aux abois
A cultiver la peur
Toi le virus perfide
On t’appelle morbide, covid morbide

Tous à vide, oh, Covid, et lâche-nous les bronches !

Plus de rassemblements
Pour danser tous ensemble
Plus de chouettes moments
Avec le cœur qui tremble
Sommes-nous invalides ?
On veut vivre, oh, morbide !

On se méfie de l’autre
S’il avait des symptômes
Filez, les bons apôtres
Oubliez les fantômes
Toi le virus putride
On t’appelle morbide, covid morbide

Tous à vide, oh, Covid, et lâche-nous les bronches !

Alors on va sourire
Si fort danse à la mort
Qui nous envoie ses sbires
Gueules d’alligators
De salopard cupide
On veut vivre, oh, morbide !

Vivre sans se terrer
Pour cause de virus
Accompagner pépéMémé au terminus
Car c’est moi qui décide
On t’appelle morbide, covid morbide

Tourne à vide, oh, Covid, et lâche-nous les bronches ! Sache que nous avons l’habitude des coups dans la tronche….